Depuis une dizaine d’années, avec notamment l’utilisation massive de Twitter, Jean Michel Aulas, a pour habitude de dire des absurdités sur ce réseau social. Son intervention sur la continuité de la ligue 1 avec le coronavirus en est un excellent exemple. ( notre article sur le coronavirus ). On va prendre du recul et se demander pourquoi il adopte cette stratégie, qui en surface du moins est néfaste à son image. Quelle est la stratégie de communication de Jean Michel Aulas ? 

Pour comprendre les propos de ce personnage bien particulier du foot français, on va s’appuyer sur un livre, qui, en apparence, n’a pas grand chose à voir avec le monde du foot. Ce livre, c’est Croyez moi, je vous mens de Ryan Holiday. Dans cet ouvrage, l’auteur, explique que le développement des blogs, et surtout de Twitter a crée une surenchère permanente dans l’importance perçue des informations. Derrière ces termes un peu obscurs, il y a des faits que nous observons tous les jours sur internet. Je m’explique. L’essor de Twitter a permis à un nombre croissant de personnes de s’exprimer. Un problème s’est alors posé pour ceux qui voulaient être lus par le plus grand nombre : comment être visible dans l’océan de contenu publié chaque jour sur la toile ? La solution pour les médias et les blogueurs qui voulaient beaucoup de trafic avec des articles de qualité douteuse a été de mettre des titres plus aguicheurs, avec des news toujours plus grosses. C’est là qu’est né le clickbait, ou putaclic en français ( c’est quand même moins élégant ). Tout le monde a donc essayé de creuser son trou avec des articles de plus en plus courts, de plus en plus superficiels, et dont le titre annonçait une information énorme, dans le but d’être partagé et de devenir un contenu viral.

Mais quel rapport avec Aulas, étant donné qu’il n’a pas de blog de foot ( en tous cas à ce que je sache ) ?

En fait Aulas est en compétition avec ces médias pour avoir de la visibilité. Alors que le but de ces sites est d’attirer du trafic pour faire voir des pubs, et donc gagner de l’argent, le but du président de l’OL est de faire parler de son club, et de ses joueurs, pour qu’ils gagnent en valeur. 

Comment il fait parler de lui

Et là est le coup de génie de Jean Michel Aulas ; c’est lui qui nourrit ces sites de foot. Imaginons que vous teniez un blog de foot qui cherche à tout prix à faire parler de lui et à attirer du trafic : vous êtes constamment à la recherche d’une news, d’une information sensationnelle qui ferait cliquer sur votre article. Aulas a compris cela, et il en profite. Il facilite la tâche de ces rédacteurs en publiant directement ses informations sur Twitter, là où quasiment chaque journaliste se rend quotidiennement. Ces “journalistes” n’ont plus qu’à prendre l’info, et à la relayer. Tout le monde est gagnant en apparence ; Aulas a fait parler de lui, et les sites ont eu du trafic.

Mais il y a un problème avec ça : les journalistes ont tendance à s’éloigner des sujets de fond sur le football, comme la tactique, pour rester sur des débats superficiels. Tout n’est pas de la faute des journalistes, qui doivent toucher une audience pour vivre. C’est donc nous, en tant que consommateur d’informations sur le foot, qui devons faire attention à ce que nous partageons, en essayant de ne pas nourrir cette machine d’escalade dans le sensationnel. Soutenons plutôt des bons créateurs de contenus plus profond, comme La Gazette Tactique ou Wiloo.

La Tribu Des Supporters de l’OL

Aulas a d’autres techniques pour faire parler de lui. Alors que dans la première partie de l’article on a parlé des news qu’il créait directement via son compte Twitter, on va ici parler d’une autre de ses compétences : l’art de la polémique, et Aulas est le Picasso de la polémique. Quand il dit une information pour créer un débat, il y a évidemment, et heureusement, des journalistes à gros caractères, comme Riolo, qui le contredisent et c’est comme ça que démarre une polémique. L’objectif d’Aulas quand il crée une polémique est bien sûr de faire parler de lui et de son club, mais il veut aussi fédérer sa tribu, la tribu des supporters de l’OL.

Pour comprendre comment les débats entre Aulas permettent aux soutiens de l’OL d’être plus unis, il faut comprendre 2 concepts de psychologie sociale; le principe de la polarisation de groupe et le principe de cohérence. 

La polarisation d’un groupe, c’est la tendance qu’a un groupe à accentuer les opinions qu’on ses membres. Par exemple, si tous les supporters de Lyon pensent que Riolo est un mauvais consultant car il a critiqué leur dernier tifo, la polarisation du groupe va accentuer cette opinion, et elle va devenir plus extrême : “ Daniel Riolo est un gros con”

Le virage nord lyonnais a consacré son tifo d'avant-match au Tibet, ce samedi avant OL-FC Nantes.
Le tifo free tibet du virage nord lyonnais

Le principe de cohérence, c’est un concept qui explique que les humains veulent naturellement faire des actions qui sont cohérentes par rapport à leurs action précédentes. Ce même principe nous explique qu’un individu qui supporte l’OL, va, pour être cohérent, souvent dire qu’il est accord avec ce que dit le président du club. 

Ces principes nous aident à comprendre comment Aulas unis les supporters de l’OL derrière lui et les “radicalisent”. 

La stratégie de communication d’Aulas est donc redoutablement efficace, et c’est une des raisons qui fait la popularité de son personnage à Lyon. Il comprend parfaitement l’écosystème foot sur internet et profite du besoin de trafic de certains sites pour promouvoir son club et fédérer ses supporters.

 


Félix Couraud

Créateur de pour le jeu

1 commentaire

La chute d’Anthony Martial – Pour Le Jeu · 27 mars 2020 à 17 h 39 min

[…] toutes attentes, Aulas décide de le vendre à la fin de la saison, pour des raisons […]

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